Il y a dans la vie des évènements cycliques malheureux, comme la mode des pattes d’éléphants, et
d’autres plus heureux, comme les jours fériés. Or qui dit week-end de Pentecôte dit … Vogalonga !
C’est en effet le dimanche de Pentecôte que se déroule à Venise, chaque année (si la Chine ferme
bien les frigos de ses laboratoires), la très célèbre Vogalonga.
Véritable histoire d’amour entre Venise, sa lagune et tout ce qui se déplace sur l’eau sans voile et
surtout sans moteur, il s’agit d’un événement pour les passionnés de rame du monde entier
particulièrement fidèles et encore aujourd´hui une action pacifique en opposition au danger pour la
ville et ses lagunes que représentent les vagues provoquées par les nombreux bateaux à moteur. La
Vogalonga protège et conserve l’originalité et le charme de Venise depuis plus de 40 ans.
Après une longue préparation, une planification minutieuse et quelques cheveux gris (merci Cédric
pour les cours de remorque-école), c’est une délégation de dix valeureux rameuses et rameurs
morgiens qui ont fait le voyage pour participer à cette mythique balade de 34 kilomètres dans la
lagune vénitienne. Pour certains, et je dois admettre que j’en faisais partie, un rêve vieux de presque
30 ans….
Après avoir affronté le Grand Saint-Bernard avec une remorque chargée de 3 yolettes (les deux de
Morges et celle du gymnase de Chamblandes), traversé le nord de l’Italie en largeur, failli perdre une
barre de toit sur l’autoroute et nous être vus refuser l’accès au parking habituel de Venise, nous
avons finalement pu poser notre remorque au pôle nautique de Mestre, côté terre ferme, qui sert
désormais de base à tous les bateaux venant de l’étranger pour participer à la régate, dans un joyeux
désordre teinté d’une touche de drame bien latine comme on les aime.
Le samedi nous a vu monter et préparer nos bateaux sous un soleil radieux, accueillir nos derniers
collègues rameurs manquant encore à l’appel et finalement amener nos bateaux à la rame vers
Venise, sur l’île de la Giudecca, où nous logions pour le week-end. Une jolie balade d’environ 10
kilomètres pour nous mettre en jambes. Nous avons été accueillis, après force palabres,
gesticulations et don de t-shirt du club au « Presidente », par le Club Canottieri de la Giudecca qui
nous a autorisé à laisser nos trois yolettes chez eux pour la nuit, et tant mieux car notre logement se
trouvait à 5 minutes à pieds.
Est venu enfin LE jour J, le dimanche de Pentecôte ! 7h30 assis dans le bateau, départ pour la place
Saint-Marc, attente ébahie et émerveillée dans la houle, au milieu de pas loin de 2000 embarcations
de tout genre, canoés, paddles, bateaux d’aviron divers et variés, gondoles, pupparin, mascarete
(bateaux de rame traditionnelle vénitienne, dans lesquels les rameurs sont debout et face à la
proue), etc… Coup de canon à 9h, puis contournement par le sud de la pointe de l’Arsenal (je vous
laisse imaginer la cohue, particulièrement à l’abord de virages à angles droit dans le parcours), vogue
dans le chenal le long de l’île de San Erasmo, embouteillages à Burano, redescente vers Murano,
traversée de l’île devant les ateliers des maîtres verriers, puis retour à Venise pour rentrer dans la
ville par le canal du Cannareggio.
Et là, comment décrire le plus-ou-moins joyeux chaos que représente la rentrée d’autant de bateaux,
naviguant à des vitesse différentes, avec un léger courant, dans un canal plutôt étroit bordé de
terrasses de bistrots bondées de spectateurs et surtout barré d’un pont à trois arches dont la plus
grande mesure environ 10-12m de large…. Coup de stress tant pour les participants que pour les
pompiers de Venise qui, sur terre armés de longues perches ou en hommes grenouilles casqués (un
coup de rame est si vite arrivé..), s’évertuent à pousser les bateaux de gauche et de droite pour
essayer de faire passer tout ce petit monde sous les arches sans dommages !
Le dernier tronçon nous amenant à l’arrivée en descendant le Grand Canal pour un retour à la place
Saint-Marc, il nous a fallu ensuite remonter le Grand Canal, puis emprunter un petit canal pour
rejoindre le quartier de la Gare et finalement retourner à Mestre par la lagune pour clôturer une
magnifique boucle d’environ 37 kilomètres.
Après un homme à la mer, un échouage sur un banc de sable, une crise d’hypoglycémie, quelques
coups de soleil, beaucoup de cloques, encore plus de piqûres de moustiques et une saine fatigue,
c’est surtout avec beaucoup de bonheur et d’émotions que les deux équipages ont pu se retrouver et
célébrer cette épopée unique autour d’un bon repas.
Le lundi a vu le retour des bateaux et des rameurs à Morges, fatigués mais heureux et conscients
d’avoir pu participer, en équipe et en grande amitié, à un évènement unique et fédérateur.
Anne, Antonella, Francine, Martine, Maryannick, Christian, Julien, Pascal, Thomas, merci du fond du
cœur, vous êtes des stars !
Un tout grand merci également à Steve pour sa contribution à la préparation des bateaux.
Catherine Brot